« Le mariage de plaisir » de Tahar Ben Jelloun

mariage de plaisir

Dans son nouveau roman Le mariage de plaisir, Tahar Ben Jelloun de l’Académie Goncourt, parle du racisme contre les Noirs, en Afrique du Nord. Plus précisément au Maroc, son pays d’origine. Un thème trop souvent tabou dans le monde arabe, à travers l’histoire d’Amir dans les années 50.

Sa vie bascule, lorsqu’il décide d’emmener Nabou, une Peule de Dakar chez lui à Fès. Noire dans une famille blanche, la seconde épouse se confronte au racisme latent des Arabes blancs de peau. 

Un roman à vivre, qui vous empoigne !

Tous nos noms de Dinaw MENGESTU

Isaac quitte Kampala où rode l’ombre de la dictature après avoir rencontré un jeune militant qui lui sauve la vie. Il arrive à Laurel, bourgade du Midwest raciste et sans intérêt, Helen, l’assistante sociale mise à part. Entre ces deux êtres, une histoire d’amour s’ébauche dans l’Amérique des années 70 entre combats pour les droits civiques et résistances conservatrices.

Il s’agit dans ce roman de deux récits alternés, deux êtres, deux voix que tout oppose.

Tous nos noms a eu un succès fulgurant aux Etats-Unis, ce roman est brillant tant dans le fond que dans la forme !

Bonne lecture

« Délivrances » de Toni Morrison : la puissance littéraire d’une grande dame de 84 ans

« Délivrances » le dernier roman de Toni Morrison est le portrait de Lulla Ann Bridewell, fille de « mulâtres au teint blond », mal aimée par sa mère parce que trop noire. Un roman court et intense, où il est question d’enfances massacrées et de l’amour comme possibilité de renaissance. Un livre magnifique d’une grande dame de la littérature américaine.

«Délivrances», le onzième roman de la Prix Nobel de littérature, continue à scruter la ségrégation raciale et le racisme. Lula Ann devenue Bride est la victime de son apparence, de son corps, de sa peau… Entre fantastique et fable sociale, l’auteure de «Beloved» s’impose, magistralement, et en toute liberté.

Délivrances est un nouveau petit chef d’œuvre de l’auteure de Beloved et Home.

Un régal !!!

Noire de Tania de Montaigne

 

 

noireQui ne connait pas Rosa Parks ? Et pourtant, qui connaît Claudette Colvin ? C’est là tout le paradoxe que soulève et démontre Tania de Montaigne dans son ouvrage,véritable hommage à cette femme toujours en vie aujourd’hui.
On découvre Claudette Colvin, cette héroïne méconnue, mais l’auteur met également des noms sur ces noirs qui, à l’image de Rosa Parks, ont osé refuser de s’effacer devant des blancs. Un ouvrage qui enseigne beaucoup sur ce combat et sur la ségrégation et son impact sur le quotidien des noirs dans les années 50.
En plaçant le lecteur dans la peau d’un noir dans les années 50, Tania de Montaigne souhaite nous faire ressentir l’injustice, les difficultés de chaque moment du quotidien. Car on a beau avoir entendu parler de la ségrégation raciale, de ces séparations permanentes entre noirs et blancs, avons-nous réellement pris conscience de l’impact que cela avait sur le quotidien ?  Sur les petites choses de chaque jour pour lesquelles des obstacles viennent tout compliquer ?

Les Larmes noires de Mary Luther

les larmes noires de mary luther

Le sud des Etats-Unis au milieu du XXe siècle, des citoyens qui ont oublié que l’esclavage avait été aboli, et une enfant attachée à sa bonne noire…. En 1954, alors que rien ne va plus entre elle et son mari, Paula décide de traverser le pays, seule avec ses enfants et leur bonne, pour rejoindre son frère. L’occasion de nous rappeler tous les interdits auxquels étaient confrontés les Noirs : impossible de dormir dans le même motel que les Blancs, inenvisageable de se baigner dans le même océan. Anna Jean Mayhew décrit avec sensibilité cette Amérique d’il y a soixante ans, dans laquelle aller sur la Lune semblait plus probable que d’élire un président noir.

Ce qui peut être surréaliste est que l’histoire se déroule il y a seulement 60 ans !!! Au fil des pages, le lecteur découvre les humiliations quotidiennes : les petites réflexions, l’impossibilité d’avoir une chambre d’hôtel correcte, les insultes, … d’un autre côté, un blanc ne doit pas partager ses toilettes ou même un verre avec une personne noire.

Une vision du rôle de la femme dans les année cinquante. Une histoire très émouvante qui fait un peu penser au roman La Couleur des Sentiments.

Ghetto Brother, une légende du Bronx / Julian Voloj & Claudia Ahlering

Découvrez en bande dessinée l’histoire vraie de Benjy Melendez, une légende du Bronx !ghettto brother 2

Sur fond de guerre du Vietnam et d’assassinat de Martin Luther King, plongez dans l’univers des gangs et assistez à l’évolution urbaine, sociale et musicale du New-York des 60’s.

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De son quartier ravagé par la drogue, la violence et la pauvreté, de son époque marquée par les mouvements contestataires, Benjy Melendez tire une énergie formidable et ultra positive : son gang sera multiracial et pacifique ! Parmi ses nombreuses actions, le gang organise chaque semaine des concerts ouverts à tous, sur le bitume ou dans les immeubles désaffectés, qui verront émerger le mouvement hip hop avec les mythiques Kool Herc et Africa Bumbatta. Le gang fondera également son propre groupe, dont la musique sonne comme autant d’hymnes joyeux et positifs, rythmés par l’énergie de leurs batteries, quelque part entre soul, rock et ambiances latinos… Toutes les cultures d’un quartier représentées dans un groupe, fusionnées sous le nom de « Power Fuerza », album enregistré en une seule journée, en 1972.

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Cette plongée historique au coeur d’une époque et d’un quartier est portée par le trait pour le moins sombre et charbonneux de Claudia Ahlering. Le récit de la vie de Benjy Melendez écrit par Julian Voloj ouvre une porte sur l’un des sujets les moins traités de l’histoire de New York et offre une introduction passionnante à l’histoire de la culture hip hop. L’utilisation du médium bande dessinée est pour sa part une grande trouvaille qui permet de se plonger avec délectation dans l’esthétique si particulière de ces années. Un régal pour les yeux et pour l’esprit.

J’me sens pas belle de Gilles ABIER

 je me sens pas belle

Sabine a dix-neuf ans. Avec son nez épaté et ses yeux globuleux, elle se trouve particulièrement laide. Tellement laide, qu’elle économise depuis son plus jeune âge pour s’offrir une double opération de chirurgie esthétique.

Ajmal est afghan. Il a vingt-cinq et il est magnifique. Tous deux se rencontrent par hasard dans une allée de supermarché et Sabine tombe aussitôt sous le charme de ce bel étranger. Contre toute attente, les sentiments sont réciproques et Sabine exhibe son amoureux avec fierté. Mais malade de jalousie, elle reste sur ses gardes, à toujours se demander « ce qu’un type comme lui fout avec une nana comme elle ».

Un mois plus tard, c’est la catastrophe : la police débarque au petit matin et emmène Ajmal au commissariat. Car le jeune Afghan est un sans-papiers. Arrivé clandestinement sur le territoire français, il n’a jamais fait aucune démarche administrative pour légaliser sa situation. Ajmal risque donc d’être expulsé de France…

Quelqu’un a dénoncé la situation illégale d’Ajmal. Mais qui ?

Un livre bouleversant sur la précarité des sans-papiers et sur leurs relations souvent décriées avec des Françaises.

Bonne lecture !

Droit du sol, de Charles Masson

droit du solL’intérêt de cet album instructif tient à ses personnages.  L’histoire se déroule à Mayotte.. , l’ile accueillante…. Revenons donc à nos personnages :

Il y a Serge le frustré adipeux, Pierre le toubib, parti plus pour prendre quelque distance avec son épouse que pour soigner une humanité dans le besoin, ou encore Jacques l’héroïnomane en mal de sevrage. Tous s’éprennent qui de Lucie, qui d’Anissa ou de Marie, belles beautés des îles et clandestines en quête de mariage… ou pas.

Charles Masson dresse le portrait de ces Français exilés et de ces clandestins ayant survécus à la périlleuse traversée. Au fil de l’histoire, les personnages évoluent, tout en levant le voile sur les aspects peu reluisants de l’île (prostitution, arnaques en tout genre,…). Il souligne l’évolution du regard des mahorais et des métropolitains au fur et à mesure des changements politiques. L’arrivée de Sarkozy à la tête de l’État va par exemple précipiter la « chasse »  aux clandestins qui avaient jusque là plus ou moins leur place dans la société mahoraise. Il pose aussi un regard critique sur le système de santé à travers les personnages de médecin et de Danièle la sage femme.  A son arrivée, Danièle est là pour accoucher les femmes toutes nationalités confondues. Tous les soins sont gratuits. Mais voilà il faut rentabiliser les soins. Les femmes n’auront plus droit à l’Entonox (gaz qui sert à endormir les patientes puisqu’il n’y a pas de péridurales) pour apaiser les douleurs lors de l’accouchement… Comme le dit le chef de service « les femmes accouchant naturellement et sans douleur sur cette île, il ne sera plus nécessaire de les endormir au gaz dans les salles d’accouchement… » (p.251)

C’est dans ce coin de l’océan Indien que Danielle, la sage-femme idéaliste, débarque. Ce spectacle, mis en scène par quelques-uns de nos concitoyens, elle le résume d’une formule : “Je suis venu pour donner, pas pour prendre ni me terrer.

« Droit du sol » raconte aussi le destin des clandestins comoriens venus chercher sur l’île de Mayotte, 101ème département français depuis avril 2013, une nouvelle vie plus heureuse, moins pauvre. Laissés pour compte de la République, ils sont d’abord exploités par les passeurs et leurs bateaux Kwassa-Kwassa, quand ils ne sont pas violés ou jetés à l’eau, puis refoulés dans les hôpitaux pour que les femmes n’accouchent pas de leurs enfants sur le sol français de manière officielle, exploités encore par les habitants des lieux qui s’en servent comme d’une main d’œuvre à bon marché. Droit du sol croise le récit de plusieurs personnages, l’idéaliste venue à Mayotte oublier le gris de Paris, celui qui veut donner un sens à sa vie, celui qui ne pensait plus trouver l’amour, celui qui en profite depuis que les putes malgaches ont augmenté leur tarif, celui qui se bat pour le respect de la dignité.

Qu’on se le dise, la bande-dessinée appartient à la famille littérature et bonne lecture !

En savoir plus sur : Droit du sol, Charles Masson

Le thé au harem d’Archi Ahmed de Mehdi Charef

Le Thé au harem d’Archimède est le premier long métrage de Mehdi Charef, tiré de son roman Le Thé au Harem d’Archi Ahmed publié en 1983 au Mercure de France. Né en Algérie, alors en guerre, Mehdi Charef arrive en France en 1962, à l’âge de dix ans. Il vit avec sa famille dans un bidonville à Nanterre avant de s’installer dans une cité HLM de Gennevilliers.
Le livre et le film racontent l’histoire de Madjid qui trouve refuge, dans la banlieue où il vit, auprès de sa bande de copains, notamment Pat, un français de souche et son alter ego blanc. Les deux amis paumés errent ensemble dans leur cité HLM où ils font les quatre cents coups. La mère de Madjid, la courageuse Malika, élève seule sa grande famille et désespère de voir son fils livré à lui-même. Partagé entre deux cultures, le fils refuse de répondre en arabe à sa mère, porte un blouson noir et écoute du rock anglais. Malika, quant à elle, n’accepte pas que son fils devienne français pour trouver du travail plus facilement.

Anissa Berkani Rohmer

Home de Toni Morrison

Toni Morrison écrit depuis 1970 des romans qui traitent de la communauté noire américaine, des fictions, intimistes et de plus en plus épurées.

Home  son nouvel ouvrage, poursuit et peaufine en 150 pages ce travail de concision charnelle et poétique à travers l’histoire de Frank Money et de sa sœur, prénommée Cee. Frank revient de la guerre de Corée.

Brisé !

Frank Money n’a donc, comme son nom ne l’indique pas, pas le moindre rond. Démobilisé d’une armée de noirs et de blancs, il traîne depuis près d’un an sur la côte Ouest, du côté de Seattle, hanté par les images persistantes de la guerre, visité à l’occasion par une étrange créature en costume zazou bleu pâle. Une lettre l’informant de la gravité de la situation de Cee, sa jeune sœur, il quitte la femme qui prenait soin de lui, et s’embarque dans un long périple direction home.

D’une écriture limpide, le texte percute, frappe, comme un blues qui gronde et revient entêtant nous hanter.

 Home est sans nul doute mon coup de cœur de l’année et je le relirai avec joie.

Anissa Berkani Rohmer