Hier soir nous sommes allés voir avec deux ami(e)s dont je tairais le nom , le film Starbuck, réalisé par Ken Scott, avec en vedette Patrick Huard, Julie LeBreton et Antoine Bertrand.
Nous avons passés une soirée hilarante, drôle….et voici notre critique du film :
Quand arrive un film comme Starbuck, c’est une bouffée d’air frais, car on ne s’attend qu’à une comédie classique et on a le plaisir de découvrir un charmant long métrage, beaucoup plus profond que ne le laissent supposer la bande-annonce et les extraits diffusés.
Le film s’inspire de faits divers véridiques pour exploiter sur le mode loufoque un dilemme juridique : l’utilisation massive de dons de sperme provenant d’un même donneur.
Patrick Huard incarne David Wosniak, fils d’immigrés polonais qui ont une boucherie.
Ce quadragénaire irresponsable a été relégué par son père et ses frères à la livraison, seul travail qu’il est capable d’effectuer sans trop de mal (et encore!). Parallèlement, notre homme est amoureux de Valérie (Julie LeBreton). Mais cette relation est mise à mal quand la jeune femme commence à douter de la capacité de David à prendre ses responsabilités paternelles.
Or, ce qu’elle ne sait pas, c’est que dans sa jeunesse, David Wosniak a fréquenté régulièrement une banque de sperme sous le pseudonyme de Starbuck. Il était loin de penser que cette source de revenus pourrait bouleverser sa vie vingt ans plus tard.
À quarante-deux ans, l’éternel adolescent, couvert de dettes fait le livreur pour la boucherie familiale. Entre un frère angoissé par la naissance de son premier enfant et un meilleur ami blasé par trois enfants ingérables. .Un jour il prend connaissance que son sperme a donné naissance à 533 enfants, le choc est violent. Dans le même temps, il apprend que sa petite amie est enceinte.
David se trouve malgré lui confronté à une question existentielle : que signifie « être père » ?
Rapidement, David Wosniak décide d’aller voir de près à quoi ressemblent quelques-uns de ses enfants, ne serait-ce que pour savoir jusqu’où va l’hérédité. Sont-ils heureux ? Ont-ils certains de ses traits de caractère?
Starbuck fonctionne en permanence sur le mode du décalage et du dérapage pour désamorcer toutes les situations mièvres ou mielleuses lié aux sujets de la paternité et du couple.
Ainsi, la scène où, au milieu de la nuit, David confie avec émotion son désir nouveau d’être père à son meilleur ami est à la fois hilarante et d’une grande vérité. Ce dernier lui fait un portrait affligeant de son quotidien de père, alors que ses enfants se lèvent un à un pour aller dormir dans le bac à sable du jardin sans écouter leur papa dépassé.
Entre humour et émotion, Starbuck repose beaucoup sur la qualité de son interprète principal, Patrick Huard, star de la comédie au Québec sur scène et à l’écran. Présent dans presque tous les plans, il trouve ici un rôle de choix qui lui permet de composer une performance nuancée. Il assure l’adhésion du spectateur même dans les séquences plus fragiles.
Mais Ken Scott parvient toujours à ramener le film vers ce que fait sa force : David, alias Starbuck, le looser magnifique, le poissard valeureux, dont la vie semble ne pouvoir être qu’une succession d’embrouilles et de galères dans le dédale du Mile End.
Rapidement, il se prend au jeu. Se déguise en livreur de pizzas pour aller porter secours à sa fille. Va rendre visite à l’un de ses fils dans le café où travaille cet aspirant comédien. Bref, après avoir mis le petit doigt dans l’engrenage, il est pris jusqu’au coude !
Je ne dévoile rien d’autre de la suite ni même de la conclusion de Starbuck. Sachez seulement que Patrick Huard joue finement et habilement sur toutes les cordes sensibles de son personnage. Et si, au début du film, on ne peut que le prendre en pitié, on s’attache rapidement à David Wosniak. Maladroit, parfois inconscient, le bonhomme est un grand sentimental.
Les relations avec, d’un côté, sa famille (son père et ses frères, sa mère étant morte) et, de l’autre, ses centaines d’enfants, sont habilement explorées. Avec beaucoup de finesse et des touches d’humour bien placées, Ken Scott soulève des questions graves, qui sont au cœur de l’existence.
En confrontant un sujet polémique sur l’éthique médicale à un personnage de comédie burlesque, Ken Scott réussit son coup. Le rire permet d’aborder sans démagogie une question sensible et complexe dont la société occidentale ne peut faire l’économie aujourd’hui. Au passage, le réalisateur québécois se paie le luxe de proposer un film très juste sur les affres de la parentalité.
Oui ! Starbuck est à voir au cinéma. ! Il faut absolument le visionner à plusieurs, entre amis ou en couple dans une salle pleine. Et, bien sûr, le plaisir se poursuit au-delà de la séance puisque c’est un long métrage dont on va aimer discuter.
(On peut vous l’affirmer ! Hein les potes ?)
Anissa Berkani Rohmer